El Gustal de Campocerrado
El Gustal de Campocerrado

Fernando Madrazo détient à « Campocerrado » un petit trésor : les vestiges de l’encaste Manuel Arranz. Cet encaste d’une grande renommée dans les années 1960 est aujourd’hui totalement oublié. Ganadero romantique, il a repris cette origine en hommage à son grand-père : Manuel Arranz. Pour Fernando Madrazo la diversité est aussi une question très importante ; sans elle, la cabaña brava perd de sa richesse et la préserver est un devoir.
Les vaches sont tenues dans une excellente forme et le discours du ganadero fait plaisir à entendre. D’autant que ses mots sont soutenus par l’afición de son fils Ángel, qui tiente pratiquement toutes les vaches et s’investit particulièrement dans l’aventure.

Ancienneté : -
Devise : Vert et Vieil Or
Signal : Ahigarado à chaque oreille
Propriétaire : El Gustal de Campocerrado, S.L.
Gérant : Fernando Madrazo Arranz
Fincas : "Campocerrado"  Martin de Yeltes
   Asociación de Ganaderías de Lidia





Crédits photographiques : Terre de Toros  

 

Alberto Mateos Matilla intègre l’Asociación Nacional de Ganaderías de Lidia (second groupe) en 1952. Installé sur la finca « San Pedro Acerón » à Carrascal de Obispo en plein Campo Charro, il choisit d’élever du bétail local provenant de chez Espioja. Sans bruit, il va faire vivre sa ganadería et forger l’éducation de ses enfants qui resteront fidèles à la tradition campera en prenant sa suite lors de son décès, en 1962.
La famille est nombreuse et très aficionada, donnant lieu à la création ou à l’achat de nombreux fers. Le premier à investir est Juan, qui achète en 1958 l’élevage de Fernando Torres. Puis, dans les années 1980, c’est l’explosion : Alejandro reste à la tête du fer historique qui est dédoublé au profit d’Ángel. En 1986, Juan Agustín achète l’élevage de Francisco Pallarés Colmenero le renommant Hermanos Mateos Sánchez et, enfin, en 1989, Agustín crée son propre fer qu’il inscrit au nom de sa fille Antonia Sánchez Laso. Excepté Juan, le bétail des frères Mateos Sánchez est rassemblé sur la même finca.

Suite au décès de sa mère, Fernando Madrazo hérite avec ses sœurs de la finca familiale située sur le célèbre lieu-dit de « Campocerrado ». La finca est partagée en deux, la portion attribuée à ses sœurs est louée à Andoni Rekagorri et Fernando conserve 250 hectares pour créer sa propre ganadería. Il achète le fer d'Antonia Sánchez Laso et entre ainsi à l’« Asociación ». Mais son but n’est pas de poursuivre une des branches de la famille Mateos Sánchez, sinon de faire reprendre l’histoire ganadera de sa famille, interrompue depuis une vingtaine d’années. Car Fernando n’est autre que le petit-fils du grand Manuel Arranz Sánchez.
Manuel Arranz avait dans les années 1960 un des élevages des plus réputés de la puissante U.C.T.L. et les figuras se plaisaient à affronter ses toros. L’homme avait débuté dans les années 1920 avec des vaches d’origine Martínez, sur lesquelles il plaça un étalon du Conde de la Corte. Le fracaso fut tonitruant, un des très rares échecs générés par un étalon sorti de « Los Bolsicos ». C’est alors que 'Fibustero' de Graciliano Pérez Tabernero est arrivé, tel Zorro. Il transforma le mal en bien et l’entreprise fut une merveilleuse réussite. Ses produits sortirent bravissimes et l’élevage de Manuel Arranz commença son ascension. Plus tard, des étalons d’Antonio Pérez-Tabernero cimenteront définitivement le croisement.
Après le décès de Manuel Arranz, l’élevage fut vendu en 1976 au cordouan Ramón Sánchez. Mais deux ans auparavant, Alfonso Navalón acheta un lot de vaches. C’est chez ce dernier que Fernando Madrazo va tout d’abord puiser pour retrouver l’héritage de son grand-père. Puis il ajoutera un étalon du fer de Ramón Sánchez.
L’idée maîtresse est de conserver cet encaste devenu aujourd’hui plus que rare. La finca est petite et, en conséquence, la camada courte. Mais qu’importe, l’important est d’exister. Fernando Madrazo cherche à travers son passé un présent. Sans être trop ambitieux et parler de réussite ou de projections dorées, continuer à préserver ce patrimoine génétique fait déjà la joie des « aficionados à la diversité ». Car comme le dit Fernando, « dans la diversité se trouve la richesse » !

 


El Gustal de Campocerrado est en quelque sorte la continuité de l’élevage de Manuel Arranz. Un prolongement que conduit une logique familiale, Fernando Madrazo Arranz étant le petit-fils de Manuel Arranz et, bien entendu, le bétail suit la même filiation. Intéressons-nous donc à l’encaste Manuel Arranz aujourd’hui méconnu et qui a pourtant donné à la Fiesta un nombre incalculable de toros de bandera.

Dans les années 1920, Antonio Pérez-Tabernero part dans la sierra madrilène pour acheter 120 vaches à Vicente Martínez. Cet élevage était un des fleurons de son époque. Son ganadero ayant parfaitement reconverti ses vieux Jijón veragueños en apportant le sang Ibarra par le célèbre 'Diano'. Les toros de Martínez, parmi les préférés du grand Joselito, étaient alors « encastés » Ibarra avec une grande majorité de robes noires, seules quelques robes berrendas aparejadas subsistaient des anciennes origines. De retour dans le Campo Charro, Antonio Pérez-Tabernero se gardera 60 vaches qu’il plaça au nom de son épouse María Montalvo et vendit l’autre moitié à Manuel Arranz. Manuel Arranz ira chercher un étalon de même origine pour couvrir ces vaches. Quoi de plus naturel alors que de tendre sur ce qui se faisait de mieux et d’aller chercher la perle rare à « Los Bolsicos », chez le Conde de la Corte. Une maison qui n’eut pas qu’une perle et qui venait de fournir d’excellents produits au voisin de Manuel : Atanasio Fernández. Mais la tauromachie est, comme chacun sait, bien capricieuse et la logique n’est point de ses vertus. 'Abejorro' du Conde de la Corte va s’avérer un piètre étalon. Le résultat porte un nom : fracaso. Manuel Arranz est désespéré et son ami Graciliano Pérez-Tabernero, pour tenter de le consoler, lui prêtera un eral : 'Filibustero'. L’animal, d’origine Santa Coloma dans la ligne Ibarra, va faire merveille et inonder en une paire d’années l’élevage de Manuel Arranz. Non tienté, comme était la norme de l’époque, 'Filibustero' sortit en corrida-concours à Saint-Sébastien et remporta le prestigieux prix du Toro de Oro, récompensant le toro le plus brave du concours. Après 'Filibustero', notre ganadero s’appuiera sur deux de ses fils : 'Ricopelo' et 'Regato'. Les produits de Manuel Arranz, communément dénommés « Arranes » étaient semblables à 'Filibustero' et à ses frères Graciliano Pérez-Tabernero, alliant leur fine morphologie à un tempérament brave et ardent. Coté robe, le noir était de rigueur, mais le berrendo, souvenirs des anciens Martínez, faisait de temps à autre quelques apparitions. Des arrivées de plus en plus rare, puisque du fait de l’incertitude de leurs origines, ces toros ou ces vaches étaient systématiquement éliminés.
Si la caste des « Arranes » plaisait aux aficionados, elle était peu du goût des toreros qui, dans un premier temps, les évitèrent et rendirent leur commercialisation délicate. Devant ces problèmes, Manuel dut se contraindre à adoucir la charge de ses toros et incorpora deux étalons d’Antonio Pérez Tabernero. Le bétail de ce dernier était un mélange de Parladé et de Murube au comportement suave, trop souvent à l’excès. Le talent de Manuel Arranz va être de savoir doser le mélange entre la douceur des Antonio Pérez et la bravoure piquante des Graciliano. Manuel va rendre ses toros plus maniables sans entacher leur bravoure. Dès lors, les « Arranes » seront du goût des figuras, sans déplaire aux aficionados. Les années 1960 verront l’apogée du subtil mélange, avec des triomphes retentissants, notamment en 1964 où 3 toros firent la vuelta al ruedo dans des arènes de première catégorie. Au décès de Manuel Arranz, en 1967, commence le déclin. Le mélange perd son équilibre et bascule malheureusement du côté de la douceur avec l’apparition d’une grande faiblesse. Ses héritiers cèdent plusieurs lots de bêtes, notamment à Alfonso Navalón (1974) avant de vendre l’élevage en 1976 à Ramón Sánchez. Un cordouan aux origines charras qui ne réussira jamais à se séparer de la faiblesse de la dernière période des « Arranes ».
Alfonso Navalón, quant à lui, fut plus en réussite. Il sut récupérer du tempérament et laisser quelque peu la faiblesse tout en conservant ce sang pur, sans jamais croiser. Son caractère « atypique » faisait de lui un campero peu enclin à la cohabitation avec les taurinos et la trajectoire de sa ganadería s’en trouva lourdement impactée. Cependant, le bétail était là, même s’il n’était pas mis en valeur dans les ruedos.

En 1997, lorsque Fernando Madrazo voulut reconstruire le passé ganadero de son grand-père, il opta pour le bétail d'Alfonso Navalón, le meilleur qui soit et le plus fidèle. Vous l’aurez compris, cet encaste est affaire d’équilibre. Fernando tenta immédiatement d’incliner la balance du côté piquant et se fit prêter par Juan Luis Fraile le toro 'Pensador' (pendant deux ans). Encore une fois, l’incorporation de l’encaste Graciliano fut une réussite, une trop grande réussite. Si bien que Fernando dut acheter l’étalon 'Caribello' à Ramón Flores pour rééquilibrer les choses... Aujourd’hui, l’élevage compte 80 vaches. Elles sont réparties en deux cercados, l’un pour l’étalon de Ramón Flores, l’autre pour un des fils du toro de Juan Luis Fraile. Décidément l’encaste Manuel Arranz est bien une question de balance.

 
 

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