Raso de Portillo
Raso de Portillo

La famille Gamazo détient dans la vallée du Duero, proche de Valladolid, l’un des plus vieux élevages d’Espagne. Héritiers des Raso de Portillo de Alonso Sanz, les actuels « Raso » ont préservé une légère filiation avec leurs ancêtres, permettant à la ganadería de jouir du prestige de doyenne d’Espagne. Si, à côté du sang antique, le Santa Coloma a aujourd’hui la prépondérance, le fil, bien que mince, n’est pas rompu. Hommes de cœur, de passion et de tradition, les Gamazo entretiennent leur vision nostalgique du toro de combat, brave et encasté. Les aficionados organisateurs de Parentis ont eu le bon goût de mettre en lumière la devise en 2007. Depuis l’élevage est devenu un des classiques de la temporada Française.

Ancienneté :
Devise : Encarnat et Groseille
Signal : Zarcillo à droite et Media Luna à gauche
Propriétaire : Raso de Portillo, S.L.
Gérant : Iñigo Gamazo Manglado
Fincas : "Raso de Portillo"  Boecillo
   Asociación de Ganaderías de Lidia





Crédits photographiques : Terre de Toros  

 

La ganadería de « Raso de Portillo » est considérée comme la plus vieille d’Espagne. En terme d’élevage à proprement parlé l’affaire est contestable, une devise comme Miura étant irréfutablement plus ancienne, mais si on se réfère à la notion de regroupement ganadero, il s’agit bien là de la doyenne.
Dans les alentours de Valladolid, dans la vallée du Duero, en Castille, est apparu autour du XV° siècle un type de toro particulier. Nous nous étendrons sur ses caractéristiques dans la partie dédiée aux origines. Sa localisation exacte était le « Raso » (plaine) d’une zone marécageuse à proximité de La Pedraja de Portillo, au pied du château de Portillo. La gestion du bétail était de type communautaire, on retrouvait ainsi dans le « Raso » l’ensemble des bestiaux des éleveurs voisins de la zone. Point besoin de beaucoup d’imagination pour comprendre que le qualificatif de « Raso de Portillo » nommait l’ensemble de ces animaux.
C’est un toro de cette race qui eut l’honneur d’inaugurer les arènes madrilènes de la Puerta de Álcala le 3 juillet 1749. Le toro, comme il était alors de tradition, portait une devise blanche, couleur réservée à l’élevage le plus ancien du spectacle. Cette devise ouvrait toutes les corridas royales et ce fut également un toro d’origine « Raso de Portillo », de l’élevage de Pablo Valdés, qui fut le dernier à user du privilège, le 25 janvier 1878, en ouvrant la corrida des noces d’Alexandre XII. Pour en finir avec les anecdotes historico-légendaires liées à la vacada, rappelons que c’est un toro de Raso de Portillo qui fut arrêté de la voix par Pedro Regalado, avant de s’agenouiller devant lui. Pedro était un moine franciscain et devint par la suite le patron des toreros.

Le premier éleveur de « Raso de Portillo » reconnu fut Alonso Sanz Arévalo qui créa sa devise à la fin du XVIII° siècle. À titre de comparaison, le plus vieux fer d’Espagne, celui de don Manuel Aleas, possède une ancienneté datée au 5 mai 1788. De Alonso Sanz Arévalo, on sait bien peu de chose, si ce n’est son fer. Il laissa à sa mort en 1811 son troupeau à ses deux enfants. La part de Pablo disparut rapidement, quant à Gregoria, elle épousa Toribio Valdés qui va imposer son patronyme. Leur fils, Pablo Valdés Sanz, plus connu sous l’apodo de « La Pradera », va s’occuper de la ganadería. Aux alentours de 1840, Pablo se sépare d’une bonne partie du troupeau, tout d’abord au profit de Mazpule en 1840, puis de Julián Presuncio l’année suivante. Ce dernier héritant du même coup de la devise blanche des « Rasos » qui passera ensuite aux mains de José Marzal pour aboutir aujourd’hui à la famille Gavira. Bien qu’amoindrie, la ganadería de Pablo Valdés poursuit son chemin jusqu’en 1880, date à laquelle il vend à Trifino Gamazo y Calvo.

C’est ici, avec Trifino Gamazo que débute la véritable histoire de la ganadería actuelle. Dès lors, le fer ne quittera plus la famille. Il est à noter que Trifino utilisa une devise rouge. Le rouge représentait dans l’ancien temps la seconde ancienneté. L’homme faisait sûrement allusion ainsi à la deuxième vie de cette ganadería déjà vieille. Avec le bétail, la famille Gamazo avait également acquis d’immenses étendues terriennes, sur les lieux même de la naissance des « Raso de Portillo », telle la finca « El Quiñon de Valdés ». Trifino Gamazo enrichit son sang de la Tierra de Valladolid avec du bétail acquis aux fils de Julián Presencio.
Au décès de Trifino en 1919, ses enfants prirent la succession, la ganadería étant dirigée par Germán Gamazo y García de los Rios. Fidèle à ses ancêtres, Germán préserva le bétail et les terres jusqu'à sa mort en 1949. Germán était célibataire, alors ce sont les fils de son frère José Maria qui héritent : Iñigo, Francisco et José Maria Gamazo y Manglado. Les trois frères créent alors la société « Raso de Portillo » qui regroupe aujourd’hui une grosse vingtaine d’héritiers. Durant plus d’un demi-siècle, ils vont savoir trouver assez de dynamisme et de romantisme pour conserver les origines de leurs ancêtres. Même si des rafraîchissements de sang sont intervenus, faisant évoluer le Raso de Portillo au même titre que la sélection, le vieux sang traditionnel a pu perdurer jusqu'à la fin du XX° siècle sans être trop dénaturé. Ces dernières années, le sang s’est un peu plus complexifié avec tout d’abord en 1980 la création d’un second fer, « El Quiñon » qui marque le croisement du bétail de la casa avec un étalon de Sancho Davila, origine Maria Isabel Ybarra épouse du Marquis de Domecq. Puis un rafraîchissement de sang via des étalons d’origine Santa Coloma provenant de Dionisio Rodríguez. Les produits sortant excellents, les frères Gamazo ont agrandi leur troupeau en 2002 avec une camada de femelles de ce fer.
Retrouver les fameux « Raso de Portillo » entre les pins qui couvrent aujourd’hui les anciens marais est un privilège que nous devons à cette famille. Même si les terres sont désormais asséchées, des zones de la finca restent inondables par des systèmes de canalisations. Autre tradition perpétuée par les descendants de Germán : la croix de Santiago. Une croix est construite toutes les années saintes, soit tous les vingt-cinq ans. La première fut construite en 1900, il y a donc quatre croix qui partagent les cercados des « Raso ». À souligner également que José Maria Gamazo y Manglado a mis sa vitalité au service de l’« Asociación de Ganaderías de Lidia ». Membre fondateur en 1951, il assuma sa présidence de 1954 à 1966. Depuis le décès de Iñigo Gamazo y Manglado, ce sont ses enfants, Mauricio et Iñigo Gamazo Garrán qui dirigent la devise. L’élevage, bien que très ancien, est longtemps resté dans l’anonymat jusqu’à ce que l’afición française vienne le mettre en lumière. D’abord Parentis en novillada (2007), puis Orthez en corrida (2013), jusqu’à devenir un classique de la temporada française. Les deux frères poursuivent avec la même passion que leur père, mais désormais ils travaillent sous le regard de toute l’afición et leurs épaules sont lourdes du poids de la responsabilité d’une longue tradition.

 


Le mystère plane sur les origines des « Raso de Portillo ». L’époque lointaine de leur apparition y est certainement pour beaucoup. La thèse la plus répandue prône la rencontre au sud de Valladolid des moruchos venus de l’ouest et des Navarrais arrivés du nord-est. Probable mais rien n’est moins sûr. Toujours est-il qu’il s’agit alors d’un toro de taille mineure (terciado), de peu de morrillo et à la robe majoritaire negro listón. Suivant la formule, le colorado provenant des Navarrais, était présent mais moins courant. Si le « Raso de Portillo » faisait peu parler de lui pour son apparence, relativement modeste, son caractère détonnait. Les jarrets solides, il était réputé pour sa rudesse, cependant sa bravoure semblait irrégulière, parfois sans faille, elle était d’autres fois très mince, pour parler poliment. Mais très peu de documents nous sont parvenus pour étayer ces dires...

Difficile donc d’imaginer avec précision quel était le toro de « Raso de Portillo » de Alfonso Sanz à Germán Gamazo. La littérature donne par la suite d’autres transferts d’étalons voués à rafraîchir le sang. Opération toujours délicate s’il en est, visant à injecter du neuf sans modifier le vieux. Enfin, autant que possible ! À en croire les dires du ganadero, les résultats furent médiocres et ne restent plus que quelques vestiges d’un toro d’origine Gamero Cívico introduit avant la passation de pouvoir entre Germán et ses neveux.
Le temps s’écoulant et la race étant de plus en plus isolée, Iñigo, José Maria et Francisco furent contraints d’effectuer d’autres rafraîchissements de sang. Concrétisant des relations de confiance avec Dionisio Rodríguez, ils injectèrent tour à tour 3 étalons de la devise d’origine Santa Coloma. Les résultats étant vraiment excellents, ces injections furent plus qu’un rafraîchissement de sang, un croisement avéré.

Incités par la progéniture des « Dionisios », les trois frères franchirent un cap au début de ce siècle en achetant la camada entière de l’éleveur charro. C’est la première fois que des femelles d’une autre provenance vont être injectées dans l’élevage. Les 100 eralas furent tientées à la finca, les résultats étant exceptionnels, avec près de 90 % de diplômées ! Et pourtant, la séléction de la famille Gamazo est des plus sévères. Dès lors, l’élevage est constitué de deux souches. Le Santa Coloma pur et un mélange des deux origines avec des influences plus ou moins marquées de l’une ou l’autre des ascendances en fonction des familles.
À souligner que naissent encore quelques colorados issus de la rame originale mais pas plus de deux ou trois par camada, l’essentiel du troupeau étant negro. Autre signe du passé, la présence de rares castaños du pure race Santa Coloma. Il s’agit là d’un retour en arrière de l’origine Ibarra, sang constituant l’encaste Santa Coloma. Le novillo ‘Aforadito' grâcié en 2019 à Pedrajas de San Esteban est de ceux-là.
Pour être complet, il existe une dernière souche mais ces produits sont marqués du second fer de la casa, celui d’ « El Quiñon ».


Elevages disposant de bêtes d'origine Raso de Portillo :

 

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