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Fernando Pérez-Tabernero est né d’une famille des plus ganaderas qui soit : son grand-père et son oncle étaient déjà éleveurs de toros de combat. Elevé au milieu des toros, quoi de plus naturel que d’épouser une fille d’éleveur, en l’occurrence Luisa Sanchón, fille de Casimirio Sanchón dont il récupère le bétail en 1882. Mais Fernando comprend vite que l’avenir n’est pas dans le toro de la tierra, mais plus au sud, en Andalousie. Les premiers mouvements de bétail commencent à peine, et Fernando fait partie des premiers éleveurs du Campo Charro à importer des toros andalous. Il ramène d’un de ses voyages quelques vaches de Veragua et un étalon de Miura et débute sa propre ganadería dans la finca « Villar de los Alamos ». Il choisit une devise bleu céleste, rose et paille pour débuter à Saint-Sébastien en 1890, puis se présente à Madrid le 17 février 1895. Comme celle de leur père, l’enfance des fils de Fernando fut bercée par les toros. Et bien bercée si on peut dire, puisque tous connurent la gloire. Graciliano, Antonio, Alipio et Argimiro ne se présentent plus, si bien que seul leur prénom suffit à les annoncer. Après le décès de Fernando en 1909, ils reprennent ensemble l’élevage, excepté Antonio parti le premier voler de ses propres ailes, avant que chacun n’en fasse de même.
Graciliano est chargé de l’élevage paternel. En 1920, il décide de changer de direction et substitue les mélanges de « la casa » par une centaine de vaches et deux étalons du Conde de Santa Coloma. Éleveur d'exception, Graciliano Pérez-Tabernero, implanté à Matilla de los Caños, accroît la caste de ses Santa Coloma au point d'obtenir un des toros les plus piquants de l'histoire de la cabaña brava. Armés et imposants, ses toros garantissent un spectacle chargé d'émotion qui lui vaut l'étiquette d'élevage difficile, on les surnommera même "los Miuras de Castilla". La ganadería devient alors une des plus réputées de son époque. Vuelta al ruedo en 1925 à Madrid pour ‘Lisito', de même à Valence pour ‘Gorrión' en 1934, ou encore ‘Corchaíto' qui permit à Chicuelo de réaliser la meilleure faena de sa vie. La liste est longue et il n'est pas utile d'en venir à bout pour comprendre qu'en quelques années notre ganadero s'est fait un prénom, que ses toros ont perpétué jusqu'à nos jours. Seul point noir de ce palmarès doré, le toro ‘Fandanguero’ qui blessa à mort le torero « Gitanillo de Triana » .
En 1939, Graciliano se défait de la quasi-totalité de la ganadería au profit de José Escobar et la reconstitue à partir d’un nucléon de vaches qu’il avait conservé (25 vaches). Force de travail, il retrouva peu à peu la gloire. À son décès en 1950, l’élevage subit une seconde partition : six lots et deux fers, l’un pour ses enfants et l’autre pour sa veuve Trinidad Nogueras.
Plus tard, en 1962, Javier Sánchez Ferrero de Salamanque achète l’élevage de Trinidad. Il le revendra dix ans plus tard à Germán Pimentel et Matias Sanromán qui le baptisent le temps d’une année « Jarales de Huelmos ». C’est alors, en 1973, que Nicolás et Juan Luis Fraile achètent la devise et le bétail pour s’installer à Robliza de Cojos, à deux pas de la finca historique de don Graciliano.
Juan Luis Fraile a débuté sa carrière d'éleveur de bravos à la fin des années 1950. Installé dans le Campo Charro, il mène d’abord avec ses trois frères l'élevage du Puerto de San Lorenzo avant de créer, en 1973, avec son frère Nicolás un second élevage qu'il place à son nom. Après que Nicolás Fraile a délaissé l’élevage pour s’occuper de Valdefresno, Juan Luis se retrouve seul aux commandes. Le fer est légèrement modifié avec une rotation de 180 degrés de celui de Trinidad Nogueras et la devise bleu céleste et paille de don Graciliano est adoptée. Juan Luis Fraile se présente à Madrid le 23 août 1981, bien que vous n’aurez pas manqué de remarquer que l’ancienneté officielle du fer est celle de Fernando Pérez-Tabernero, père de Graciliano. Une des magies dont seule la tauromachie a le secret. Les résultats furent probants puisque l’expérience fut répétée deux mois plus tard. Madrid restera fidèle aux toros de Juan Luis Fraile, épaulée par Bayonne puis Bilbao. À la fin des années 1980 la ganadería est lancée, mais les plus gros succès viendront dans les années 1990 avec un point d’orgue : ‘Pensante’ qui eut les honneurs de la vuelta al ruedo et remporta tous les prix de la San Isidro 1999. Un hommage vibrant envers son éleveur qui venait tout juste de disparaître accidentellement. Sa fille Carolina et son fils Juan Luis prennent la suite sans être vraiment tout à fait prêts. La tâche est d’autant plus délicate qu’ils récupèrent également la part de leur père de l’élevage du Puerto de San Lorenzo. Un deuxième troupeau qu’ils placent au nom de leur mère María Cascón Martín. La devise passe alors des heures difficiles, alternant malchance et maladies, qui amenuiseront fortement le troupeau. En 2001 Juan Luis (fils) subit cinq cornadas qui le placent dans un état gravissime. Mais peu à peu Juan Luis et Carolina accumulent de l’expérience et trouvent leur rythme. Les résultats s’améliorent et depuis peu, l’état sanitaire s’est bonifié et laisse augurer un avenir meilleur, bien que le troupeau reste modeste et très fragile.
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En 1920, Graciliano Pérez-Tabernero décide de débuter une nouvelle aventure ganadera et importe, comme le fit quelques années plus tôt Paco Coquilla, du bétail du Conde de Santa Coloma. Précisément 140 vaches de ventres et deux étalons ‘Cristalino' et ‘Mesonero’, qui ne sont que des erales fraîchement tientés. Dans le lot de vaches prédomine l'origine Ibarra, tandis que chaque eral possède sa dominante. Saltillo pour ‘Cristalino' et Ibarra pour ‘Mesonero'. Ce dernier va s’avérer un étalon d’exception influençant grandement la vacada et fixant définitivement les gènes ibarreños. Il mourut à l'âge de 18 ans après avoir engendré plus de mille naissances. Il donna d’excellents résultats, ce qui en fit le pilier de l'élevage et imposa définitivement l'origine Ibarra.
En 1939 a lieu la première division de l’élevage. Don Graciliano décide en effet de vendre la quasi-totalité de la ganadería à José Escobar, pour repartir avec seulement vingt-cinq vaches et un étalon. Le défi que s’est lancé Graciliano est réussi et il retrouve peu à peu son meilleur niveau à mesure que l’élevage augmente. À son décès, en 1950, l’élevage en divisé en six parts, cinq pour ses fils et une pour sa veuve Trinidad Nogueras, mais physiquement l’élevage reste uni. Ce n’est que six ans plus tard, suite à la décision de Guillermo, Natividad et Casimirio de vendre leur part, que la moitié du cheptel est vendue. En 1962, une nouvelle part quitte la famille, en l’occurrence celle de l’épouse de Graciliano, Trinidad Nogueras. C’est ce lot qui arrivera entre les mains des frères Fraile en 1973.
À partir des 60 vaches de ventres acquises et de l’étalon ‘Roslito', Juan Luis Fraile et son frère Nicolás, vont faire renaître les fameux Graciliano. Juan Luis Fraile, resté seul à la tête de l’élevage après le départ de son frère, conserve les origines intactes. Sa sélection, orientée sur la bravoure, porte peu à peu ses fruits et lui permet d'obtenir une belle renommée "torista" d'autant plus que son bétail est d'excellente présentation. En toute logique, la devise devient une des préférées de l'afición madrilène. Ses enfants poursuivent la tradition sans opérer aucun rafraîchissement de sang. À noter tout de même ces dernières années des toros aux lignes Saltillo marquées qui rappellent le mélange originel accompli il y a maintenant plus d’un siècle.
Elevages disposant de bêtes d'origine Juan Luis Fraile y Martín :
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Morphologie
Arborant fièrement la descendance des toros de don Graciliano Pérez-Tabernero, les toros de Juan Luis Fraile conservent toutes leurs caractéristiques. Parfaitement inscrit dans le type ibarreño, ils sont beaucoup plus volumineux que les autres toros d’origine Santa Coloma. À la morphologie harmonieuse de ce sang, s’ajoute le sérieux des Ibarra : Longs, forts, aux têtes imposantes et aux cornes astifinas. Les membres, bien que longs conservent des lignes fines et les yeux saltones lui confèrent un regard très agressif. L’ensemble de la ganadería présente des robes noires.
Comportement
Côté moral, les ascendances du toro de Graciliano ont également étaient conservées avec des toros braves à la caste vive. Ces deux caractéristiques ont fait leur gloire par le passé et continuent à faire valoir la devise dans l’actualité, bien qu’avec irrégularité.
Il est vrai que parfois ces vertus se transforment en aspérités, en générant du sentido, voire du genio, qui compliquent leurs combats. En tout état de cause, la lidia des toros de Juan Luis Fraile est toujours passionnante, la caste, mauvaise comme bonne, garantissant l’émotion et renvoyant l’ennui à d’autres après-midi.
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