Charro de Llen
Charro de Llen

Charro. Le nom est évocateur et lie immédiatement la ganaderia à une zone géographique. Mais attention, tout n'est pas aussi évident que cela peut paraître par la multiplicité des appellations. Vicente Charro a succédé à la tête de la vacada à la famille Cobaleda en 1984, introduisant par la même l'origine Atanasio Fernandez, le tout sous l'appellation de "Charro de Llen". Depuis le décès de Vicente, c'est son fils, José Ignacio, qui s'occupe de l'élevage qu’il a d'ailleurs dédoublé en 1995, en créant le fer de José Ignacio Charro Sánchez-Tabernero, laissant la propriété du fer historique à sa mère.
José Ignacio s'avère aussi, sinon plus talentueux que son père, puisqu'en une dizaine d'années il a su hisser son élevage au premier plan. Il s'agit là de l'un des meilleurs élevages de race Atanasio Fernandez, ses toros rappelant par leur race, bravoure et vivacité leurs illustres ancêtres. Alors même que son élevage jouissait d’une belle réputation, José Ignacio décidât de ne pas luter contre le courant et pris en 2009 une décision radicale : remplacer l’intégralité de son cheptel par du sang Domecq venant de Daniel ruiz.

Ancienneté : -
Devise : Rouge et Jaune
Signal : Orejisana à chaque oreille
Propriétaire : Pilar Sánchez-Tabernero de Prada
Gérant : José Ignacio Charro Sánchez-Tabernero
Fincas : "Llen"  Las Veguillas
   Unión de Criadores de Toros de Lidia



On pourrait choisir la facilité pour décrire l’historique de l’élevage de Charro de Llen et le décliner à partir de 1983, date de son achat par Vicente Charro. Ou bien écrire l’histoire de son fer et remonter ainsi en 1948 à Luciano Cobaleda. Mais nous avons choisi une troisième voie c’est-à-dire remonter l’histoire de son créateur Vicente Charro connu également sous son titre de « Marqués de Llen ». Un titre qui l’attache irrémédiablement au lieu de pâture des toros de Charro de Llen. Un site à l’histoire taurine richissime et qui mérite que l’on s’y attarde.


Llen est une propriété située au Sud-ouest de Salamanque, proche de Las Veguillas et qui connu le taureau brave dès le XVIIème siècle où l’on recense sur le lieu deux éleveurs : Francisco Gallego et José Tejerizo qui firent combattre des toros à Salamanque en 1746 et 1747. Mais celui qui fit connaître « Llen » fut sans nul doute le Marquis de Llen. Et avant d’aborder Vicente Charro, il convient d’aborder le grand-père de son épouse, Manuel Sanchez Tabernero, premier Marquis du nom.


Manuel Sanchez Tabernero y Vicente était par sa mère l’héritier d’une vieille famille d’éleveurs. La vacada, initiée par son arrière grand-père, Domingo Tabernero Vara, vit le jour dans le courant du XIXème avec du bétail de la terre. Déjà, en 1842, la devise fit courir des toros à Salamanque et se présenta à Madrid en 1852. Le fils de Domingo, Fernando Tabernero, surnommé «El Cojo de Continos » su conserver quelques bêtes afin de poursuivre l’aventure familiale avant de léguer la ganaderia à son petit-fils peu après 1900. Nous y voilà ! A la tête du troupeau, Manuel Sanchez va entreprendre les grands travaux et remplace le bétail familial par des vaches de Veragua et des étalons de Trespalacios. Le 5 Mai 1906, le pape Pie X lui accorde le titre de Marqués de Llen, un titre qui qualifiera dès lors la ganaderia. Il fait sa présentation à Madrid le 24 Mars 1912, sans grand succès. Le Marquis, grand propriétaire terrien était ganadero par passion et non par nécessité, ainsi la présentation de son bétail était toujours soignée, quant à la qualité, nous dirons simplement qu’ils s’agissaient de toros d’une autre époque. Souffrant de problèmes cardiaques, on lui conseilla de laisser de côté sa passion d’éleveur, la chose lui faisant courir trop de risques. Les Sanchez Rico prirent sa succession en 1920, quant au Marquis, il décèda l’année suivante…
Poursuivons. Manuel Sanchez eut trois fils, Juan, Huberto et Ventura. La fille de Ventura, Pilar, épousa Vicente Charro Murga, ce dernier se retrouvant donc par mariage « Marqués de Llén ». L’homme est des plus particuliers. Excellent garochista, homme de campo, il va durant sa longue vie être à la tête de quatre élevages qu’il va pour la plupart hisser à un très bon niveau avant de les revendre.
Il fit ses débuts en 1934, en achetant une partie du troupeau de Lorenzo Rodriguez, d’origine Gamero Civico – Vazquez. Cinq ans plus tard, après une sélection draconienne, il vend à Juan Terrones. Inactif quelque petites années, il reprend du service en 1941, obtenant de Juan Cobaleda Sanchez du bétail d’origine Encinas (Vega-Villar). Juan Cobaleda alors possédait un second sang avec l’excellent sang Conde de la Corte et nombreux furent ceux qui ne comprirent pas une telle acquisition. Pourquoi partir sur le sang Encinas alors que fourmille à deux pas un des sangs les plus braves d’Espagne ? Vicente Charro expliqua plus tard qu’il connaissait parfaitement l’encaste, ayant assisté à pratiquement toutes les tientas. Il savait même le nom des vaches sur le bout des doigts avant même les avoir achetées ! Ainsi, plutôt que de s’appuyer sur la qualité d’un sang inconnu, il préféra faire confiance à son expérience et son savoir. Bien lui en prit puisque en quelques années il renforça la devise lui octroyant une bonne réputation. En 1947, il vend à Alicio Tabernero de Paz avant de se poser quelques années. Puis, en 1951, il achète un lot complet à Ignacio Sanchez, ganadero de Sepulveda, de pure origine Contreras. Cinq ans plus tard, il acquiert les droits du fer de Maria Carmen Muriel, veuve de Julian Escudero de Cortos. Eliminant tout le bétail, mélange des sangs Santa Coloma et Parladé, pour ne conserver que les purs Contreras. Le nouvel élevage est annoncé « Charro de Murga ». A son habitude, il conserve une camada courte pour mieux la contrôler et reconduit toutes les techniques d’élevage qui firent son succès. Finalement, vingt ans plus tard (1974), il vend l’élevage à José Luis Marca. D’un âge avancé, Vicente Charro ne peut contenir sa passion et réitère. En 1984, il achète l’élevage de Luciano Cobaleda pour tenter une nouvelle aventure. Mais avant d’entrer dans cette dernière, arrêtons-nous sur Luciano Cobaleda, initiateur de l’histoire du fer de Charro de Llen.


Avant de devenir ganadero, Luciano Cobaleda passa par les armes. Il fut ainsi aviateur durant la guerre civile, puis torero. Sa carrière de matador de toros fut des plus modestes et s’éteignit rapidement après son alternative prise à Barcelone le 1er Juin 1947. L’année suivante (1948), il récupère une des huit parts de l’élevage de son père Alicio Cobaleda encasté Vega-Villar. Sa sélection impose des critères « durs » qui vont faire la renommée de ses toros, surnommés « los lucianos ». Toujours très bien présentés, tendant sur le cornalon, les toros de don Luciano n’étaient pas des tendres. A leur aspect agressif s’ajoutait une caste qui l’était tout autant, et comme la faiblesse ne pointait jamais son nez, ses toros étaient redoutables et redoutés. Fidèle aux arènes de Barcelone, théâtre de son alternative, il y fit combattre sa première novillada le 4 Septembre 1949. Si la caste était toujours présente la bravoure était quant à elle irrégulière et souvent les « Lucianos » sortaient seuls du cheval. Pour corriger ce défaut, Luciano entreprit en 1954 un croisement avec du bétail d’origine Urcola de Eusebia Galache. Mais les effets furent peu probant, et, en 1968, il reforme l’intégralité du troupeau avec 80 vaches et 2 étalons (berrendos en colorado et negro) de José Luis et Arturo Cobaleda Gonzalez, de pure caste Vega-Villar. Cette fois-ci, ça y est ! Luciano obtient le toro de ses aspirations. Il se présente à Madrid le 7 Avril 1974 et la réussite est au rendez-vous. Ses toros marquent l’aficion madrilène et la devise sera dès lors répétée tous les ans. Mais la rigueur de don Luciano, si elle plaît à l’aficion de Madrid, lui occasionne aussi de nombreuses difficultés mercantiles. Les nombreuses blessures occasionnées par les « Lucianos » leur donnent dans le cercle professionnel une mauvaise réputation et à partir des années 80, la camada est lidiée entièrement en corrida de rejon. Finalement, les difficultés économiques viendront à bout des « Lucianos » qui s’éparpillent en plusieurs ventes. Les droits du fer sont quant à eux acquis par Vicente Charro.


Ganadero pour la quatrième fois, Vicente Charro part cette fois sur du bétail de don Atanasio Fernandez. Toujours fervent des petites camadas, il fait peu combattre. Très âgé, il décède en 1993, l’année de sa corrida révélation à Salamanque, qui sonne comme un hommage. L’élevage devient la propriété de sa veuve, Pilar Sanchez Tabernero, et passe sous la direction de son fils José Ignacio Charro. En 1995, celui-ci crée un second fer à son nom mais l’élevage ne fait qu’un. Son père lui a légué un élevage en marche et les années 90 sont celles des premiers succès. José Ignacio fut élevé à la bonne école, il poursuit naturellement la ligne de son père, opérant un travail de qualité hissant progressivement sa ganaderia. Bravoure et noblesse deviennent des piliers de la devise. Si la camada courte empêche quelque peu l’ampleur médiatique, des toros étoiles sont là pour rappeler les talents familiaux comme il en fut encore cas à Vic-Fezensac en 2006 avec Velonero.

 
 

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