Bucaré
Bucaré

Javier Buendia, après une brillante carrière de rejoneador, s’adonne depuis une dizaine d’années à l’élevage du bravo, à l’image de son illustre paternel Joaquin Buendia. Il gère depuis 1996 un tiers de l’élevage familial, entreposé sur la finca de toujours : « Bucaré ». L’héritage n’est pas seulement sentimental mais bien réel. Javier essaye depuis sa prise en main de revenir à l’état passé, autant du point de vue morphologique qu’au niveau du comportement. Homme de chevaux, Javier Buendia met aux profit de sa sélection les pratiques ancestrales de la ganaderia brava andalouse, comme l’ « acoso y deribo » ou la tienta à campo abierto des becerros de l’année.
En peu de temps, il a su faire revenir le nom de Buendia sur les affiches des grandes arènes, même si la devise se cantonne aux novilladas. Reste à confirmer et à améliorer sa régularité avant d’ambitionner de passer à l’étape supérieure. Mais en homme modeste, Javier avoue ne pas y penser, le marché n’étant pas encore ouvert à ce type de bétail…

Ancienneté : 13 Août 2005
Devise : Rouge et Vert
Signal : Orejisana à gauche et Hoja de higuera à droite
Propriétaire : Bucaré, S.L.
Gérant : Javier Buendía Ramírez
Fincas : "Bucaré"  Alcala de Guadaira
   Unión de Criadores de Toros de Lidia



Installé à proximité de Séville, à La Isla del Guadalquivir, dans les fincas de "Los Cesteros", "La Campañia" et "La Cascarjera", Enrique de Queralt Fernández Maquieira, Comte de Santa Coloma, va entreprendre un subtil croisement pour réunir deux des meilleurs sangs issus de l’élevage du Conde de Vistahermosa. D’une part, il achète l’élevage de Fernando Peña, soit la moitié de l’ex-élevage d’Eduardo Ibarra, ainsi que des bêtes du Marquis de Saltillo.
Le 17 Mai 1906 il fait sa présentation à Madrid avec en premier lieu le toro « Azafran » (ancienneté actuelle de la devise de Joaquin Buendia). Dès cette première course, les toros de Santa Coloma se font une réputation de durs à cuire, avec des charges sèches et âpres. Un caractère bien trempé qui restera comme leur marque de fabrique. Face à de tels opposants, la « pareja » Joselito / Belmonte obtient de nombreux succès. Notamment Joselito, qui face à « Cantinero », coupa la première oreille de l’histoire de la Real Maestranza de Séville (1915). Autre toro de légende parmi tant: « Bravio » qui eut droit aux honneurs de la vuelta al ruedo à Madrid (1919). La belle période s’étendra jusqu’à l’aube des années 20. Le Comte va alors connaître de graves difficultés financières accompagnées d’ennuis de santé. Son exigeante sélection s’en voit relâchée et peu à peu l’élevage décline, même si de grands toros redorent éphémèrement son blason. La devise s’enfonce inexorablement pour finir par être vendue en 1932. L’état de la vacada est alors tel que l’affaire ne paraît pas bien brillante pour ses acquéreurs : Juan Buendia et Felipe Bartolomé.


La venue de ce tandem au toro de lidia est un peu une affaire de hasard. Felipe Bartolomé et Juan Buendia étaient amis et associés en affaire et spécialisés dans les brebis. En 1921, ils achètent la finca de Rafael Surga (futur beau-père de Felipe Bartolomé) dans le seul but d’y faire prospérer leur négoce. L’achat ne comprenait pas seulement la finca mais également une bonne partie de bétail dont quelques bravos de don Rafael. Le cours de la viande ayant chuté, ils décidèrent de conserver les bravos. Fait anecdotique mais au combien important puisque les deux négociants se prirent peu à peu au jeu en même temps que Joaquin, fils de Juan Buendia, se découvrit une vocation. Le bétail manso ne le passionnant guère, le jeune homme n'a qu'une idée en tête : fonder sa ganaderia brava. Alors en 1932, pour assouvir la passion de Joaquin, l'association Bartolomé - Buendia se porte acquéreur et place son investissement à son nom. Est-ce l'insouciance de la jeunesse qui le poussa dans l'aventure ? Toujours est-il que la décadence du célèbre élevage andalou ne faisait qu'effleurer son enthousiasme. Fuit par les figuras et peu prisé des aficionados, Joaquim se retrouve en 1932 à la tête d'un immense élevage de près de 700 têtes aux origines variées.
Sachant l'élevage dans une mauvaise passe, Joaquin Buendia décide de travailler en sous-marin, sans lidier ses produits. Durant la guerre civile, il poursuit ses travaux et une fois celle-ci achevée, n'estimant toujours pas les résultats suffisants, il persévère. Au terme d'un laborieux travail, centré sur les origines Saltillo, Joaquin a transformé ses Santa Coloma en accord avec l’évolution de tauromachie. Le Buendia est né. Il possède une morphologie plus raisonnable, plus accommodante que le Santa Coloma et côté moral, le ganadero a su retrouver leur caste et leur bravoure légendaire pour les développer au-delà du premier tiers. Son endurance et son agressivité sont désormais agrémentées d’une charge claire et longue, jusqu’ici inédite pour la devise. Il se présente à Madrid en 1943 et c’est la révélation. L'atténuation du trapio et la noblesse de ses toros ravissent les figuras, tandis que leur caste attire les aficionados. Joaquim Buendia a atteint un équilibre qui l'installe dans le haut de la hiérarchie ganadera. Suivent tout naturellement de nombreux autres succès. Les années cinquante constituent l'apogée de la ganaderia, la réussite persévérant jusque dans les années soixante-dix. Sur leur route, les Buendias croisent le torero Paco Camino qui su les comprendre à merveille et en extirper toute l’essence à tel point que son nom est indissociable du succès de l'élevage. Durant cette période, Joaquin Buendia s’est hissé au niveau des plus illustres éleveurs de bravos, remontant une devise paraissant inévitablement perdue. La noblesse de ses Buendias n’étant jamais candeur et le plus souvent accompagnée d’une caste vive. Mais il y a tout de même un reproche qui peut être fait à don Joaquin, à savoir la réduction excessive de la tête de ses Buendias.
Car vers la fin des années soixante-dix débute la demande d’un toro plus imposant. Une demande qui se fera croissante avec le temps et à laquelle les Buendias auront des difficultés à répondre. Le toro de Buendia qui sort alors en piste est surchargé en poids. La sélection morphologique change, avec un toro de plus en plus haut et avec davantage de tête. Les résultats pâtissent de ces changements avec l’apparition d’une fadeur relative au manque de caste, du jamais vu jusque-là. Les succès se veulent moins réguliers malgré quelques triomphes de poids jusque vers le milieu des années 90, puis le néant. La ganaderia passée sous la tutelle de José Luis Buendia, fils de Joaquin, a perdu la considération des figuras et se voit écartée des grandes affiches.


En 1996, le troupeau et les fincas familiales sont partagés en trois lots pour les enfants de Joaquin Buendia, chacun donnant lieu à la création d’un fer. Maria Luisa, Joaquin et José Luis (qui conserve le fer historique) conservent la finca de « La Amarguilla » dénommant ainsi leur nouvelle devise. La finca de « Rehuelga » part aux mains de Rafael, Mari Cruz, Luis, Felipe et Juan Carlos qui annoncent leur fer « Ganaderia de Rehuelga ». Et enfin, Pilar, Carmen, Helena, Concha, Rocio et Javier garde la finca de « Bucaré », celle qui fut depuis toujours la maison des « Buendias ». A la tête de cette dernière portion, l’ex-rejoneador Javier Buendia va entreprendre un retour vers le passé pour retrouver les mensurations et les qualités morales des toros de la grande époque paternelle. Un défit qui sans être parachevé est en bonne voie. « Bucaré » réservant toute sa camada pour les novilladas et ayant trouvé dans la catégorie une certaine renommée.

 


Aux prémisses du XIXème siècle, alors que l'éventail des races du toro bravo est encore large, Don Enrique de Queralt Fernández Maquieira, Comte de Santa Coloma, se centre sur la caste Vistahermosa et ambitionne de réunir ses branches les plus fameuses pour construire la quintessence de cette origine.
Pour se faire, il achète en 1905 la moitié de l'élevage de Eduardo Ibarra (branche Barbero de Utrera de Vistahermosa) via Fernando Peña et y adjoint des bêtes du Marquis de Saltillo (branche Varea de Vistahermosa). Séparées depuis près d'un siècle, les deux rames possèdent chacune un phénotype particulier. Unir au sein d'un même troupeau les "gris" et fougueux "Lesaqueños" au style et à la noblesse des "noirs" "Ibarreños" était un pari osé. Pourtant, le talentueux comte va y parvenir, sachant tirer partie des qualités de chaque race.
Cependant, il est faux de penser qu’il y eut un amalgame entre les deux lignées de Vistahermosa, du moins dans un premier temps. A l’époque du Comte, l’élevage était très hétérogène, les deux branches, bien que mélangées génétiquement, gardaient chacune des caractéristiques fortes pour former deux grandes familles. Les Saltillos d’un côté et les Ibarreños (Ibarra) de l’autre. Chaque toro de la devise paraissait de l’une ou de l’autre des lignées, tant l’influence de l’une dominait l’autre et vice et versa. Si bien que le mélange paraissait absent. Puis, au fil des ans et des croisements, les deux matrices originelles vont se métisser pour donner de nombreuses familles aux influences plus diffuses bien que présentant toujours une dominante.


En 1932, l’élevage passe aux mains de Joaquin Buendia. Si trente ans plus tôt, le Comte de Santa Coloma avait formé sa ganaderia en réunissant les branches Saltillo et Ibarra, lorsque Joaquim reprit l'affaire, il ne restait plus que 70 vaches et deux étalons de pure origine Saltillo. Le troupeau était en majorité composé de nombreuses familles issues de "la mescla", chacune possédant un gradient différent des deux sangs, le tout largement influencé Ibarra.
Sa sélection, des plus rigoureuses va se centrer sur l'origine Saltillo et délaisser les caractéristiques Ibarreñas. Fondée sur une minorité de bêtes, ses choix sont une véritable révolution, expliquant la dizaine d’années de recherche effectuée en vase clos. Au terme de son laborieux travail où des milliers de bêtes furent sacrifiées, Joaquim a transformé la morphologie des Santa Coloma et retrouvé leur caste légendaire. De format réduit, aux lignes plus asaltilladas, ses Santa Coloma ont perdu en trapio, mais leur agressivité s'est canalisée dans une noblesse encastée. La caste Buendia était créée. Fort de la qualité de son bétail et de ses succès retentissant, Joaquim Buendia allait vendre à d’autres éleveurs dans les années qui suivirent une multitude de bêtes, faisant de sa devise un encaste.


Elevages d'origine Bucaré :


Elevages disposant de bêtes d'origine Bucaré :

 
 


Morphologie
 

Beaucoup plus commode et moins impressionnant, le toro de Buendia a nettement perdu du fameux trapio des Santa Coloma. Pourvu d'un petit squelette, ce toro est bas et léger. Peu armé, les cornes possèdent des formes diverses, allant du gacho au veleto. Bien que, suite à l’évolution de la demande du public allant vers un toro plus imposant à partir du début des années quatre-vingt, la taille et les armures du Buendia eurent tendance à augmenter, donnant lieu à des toros plus hauts et plus offensifs que le type originel. La sélection menée par Javier Buendia tente d’effacer cette période de mutation, qui outre des changements morphologiques, a également précipité ce bétail dans le « bache ».
Degollado, au morillo peu développé, les lignes sont fines, typées Saltillo. Le tout conférant un toro "terciado".


Naturellement, avec la prédominance de la caste Saltillo, les robes noires sont rares. Prédominent les cardenos dans toutes leurs variantes et les negros entrepelados.


Comportement

A sa sortie en piste tout s'inverse. L'image de sa morphologie agréable, évidement toute relative, laisse place à un tempérament de fer. Encasté et brave, bouche close tout au long de son combat, sa carrure lui permet une grande mobilité, qui met en évidence son agressivité hors du commun. D'ailleurs, au campo, ces toros sont très difficile à approcher. Surexcités, toujours sur leur garde, ils n'hésitent pas à charger, rendant la tâche de l'éleveur très délicate.
Outre leur tempérament piquant, une de leur plus forte caractéristique est leur noblesse. Lorsque celle-ci s’ajoute à leur caste agressive, l'émotion est garantie et permet des triomphes retentissants.


Cependant, la devise de « Bucaré » pâtit encore des sévices subits lors de l’évolution du toro décrit plus haut et souffre d’hétérogénéité. S’il est vrai que sortent des novillos à la caste piquante, d’autres manquent de moteur et leur grande noblesse alliée à la lenteur de leur charge manque de transmission. Cette tendance faisant ressentir un manque de caste, ce qui n’est pas toujours le cas.

 

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